Il y a deux semaines, j’ai découvert un lieu qui était sur ma liste depuis un bon bout de temps maintenant: les hospices de Beaune.
Les Hospices de Beaune, appelés aussi « Hôtel-Dieu de Beaune » ont vu le jour en 1443, grâce à Nicolas Rolin et son épouse Guigone de Salins, qui décidèrent de construire un hôpital. Nicolas Rolin est un très riche chancelier du duc de Bourgogne, Philippe le Bon. Louis XI aurait d’ailleurs dit au sujet de Rolin qu' »il a fait assez de pauvres dans sa vie pour pouvoir aujourd’hui les abriter… ».
L’originalité de ces hospices se trouve dans son architecture traditionnelle bourguignonne, ainsi que par son prestigieux domaine viticole. Ces caractéristiques en ont fait l’un des Hôtels-Dieu les plus célèbres au monde. La production de vin est historiquement vendue aux enchères pour financer son fonctionnement, sous le nom de vente des hospices de Beaune.
Aujourd’hui, les hospices de Beaune sont un musée d’histoire de la médecine, où on y expose entre autres les anciennes salles des malades et leur fonctionnement, avec leur évolution depuis 1452 jusqu’au XXe siècle. L’Hôtel-Dieu témoigne aussi du riche mécénat des ses fondateurs, à travers des œuvres exceptionnelles comme le retable du Jugement Dernier de Rogier Van der Weyden.

La visite
La visite se déroule en suivant un circuit bien précis, qui commence dans la cour intérieure, dite la Cour d’Honneur, dont nous avons tous l’image très reconnaissable en tête.
L’entrée est signalée par une flèche s’élevant à près de 50 m du sol, protégée par un auvent très décoré. Les toits multicolores de l’Hôtel-Dieu sont devenus l’un des symboles de la Bourgogne.
Ensuite, direction la Grande salle des Pôvres. Celles et ceux qui ont vu le film de La Grande Vadrouille reconnaitront immédiatement quelle scène a été tournée ici.
Inaugurée en 1452, la Grande Salle des Pôvres a conservé ses dimensions d’origine, à savoir 50 m de long pour 14 m de large et 16 m de haut. Le mobilier d’inspiration médiévale fut reconstitué lors de la restauration de la salle en 1875.
La charpente attire de suite l’oeil. Les poutres sont ornées de dragons multicolores, qui semblent cracher les poutres traversières. A divers endroits, le carrelage, tout comme les vitraux et autres décors muraux, arbore le monogramme de Nicolas Rolin et Guigone de Salins. La devise « Seulle » qui les accompagne signifie que Guigone était la seule dame des pensées de son mari. Un brin de mignonitude, cela fait toujours plaisir.
Au bout de la Grande Salle se trouve la Chapelle qui illustre bien l’alliance entre l’aspect religieux et médical des Hôtels-Dieu. C’est dans cette chapelle que prenait place à l’origine le fameux polyptyque de Rogier van der Weyden, aujourd’hui présenté à la fin de la visite. On peut y voir également Guigone de Salins, inhumée sous une plaque de cuivre.

Place ensuite à la Salle Saint-Hugues, créée en 1645 à l’instigation de Hugues Bétault, qui fut de tout temps affectée aux malades. Neuf des onze peintures murales illustrent ici des miracles du Christ. Au plafond est représenté le miracle de la piscine de Bethzaïda, tandis que le retable de l’autel évoque les guérisons miraculeuses de Saint Hugues.
Celle salle débouche sur celle de Saint-Nicolas. Elle contenait 12 lits occupés par des malades des deux sexes. Cette caractéristique choqua profondément Louis XIV lors de sa visite en 1658. Il établit donc une rente de 500 livres à l’Hôtel-Dieu afin que l’on puisse faire de nouveaux aménagements séparant les hommes des femmes. Elle n’a pris ses dimensions actuelles qu’à partir de la seconde moitié du XVIIIème siècle. La salle Saint-Nicolas abrite aujourd’hui une exposition permanente sur l’Hôtel-Dieu et son histoire, avec notamment une maquette en paille, réalisée au XVIIIème siècle par un malade.
Vint ensuite la cuisine, qui a fonctionné avec un équipement moderne jusqu’en 1985 pour les pensionnaires de la maison de retraite. Elle a aujourd’hui retrouvé son aspect du début du XXème siècle avec son grand fourneau. C’est une très belle chouette remplie de pièces remarquables. La cheminée gothique à deux foyers en est la pièce maîtresse, celle-ci a conservé ses accessoires d’époque. Le plus spectaculaire est le tournebroche de 1698 animé par un petit automate super mignon, Messire Bertrand. Celui-ci est en costume traditionnel de cuisinier du XVIIe siècle et semble tourner la manivelle en veillant sans cesse aux activités de la cuisine.
Sous le porche, avant d’entrer à la pharmacie, ma pièce préférée, vous apercevez, au travers de la grille en fer forgé, la cour des Fondateurs avec les statues de Nicolas Rolin et Guigone de Salins, réalisées en 1914 et 1923. Les bâtiments fermant la cour abritaient à l’origine les réserves de grains. Un jardin de plantes médicinales a récemment été reconstitué dans cette cour.
Direction donc la tant attendue Pharmacie, qui permet de visualiser le travail fourni par les sœurs apothicaires, qui préparaient les remèdes destinés aux malades hospitalisés. Sur le fourneau, deux imposants alambics en cuivre permettait d’extraire les substances actives des plantes dont certaines étaient issues du jardin des simples, à l’arrière de cette pièce. A côté se trouve une seconde salle, où des étagères présentent une collection de 130 pots de faïence datés de 1782, dans lesquels étaient conservés les onguents, huiles, pilules ou sirops… Les pots de verre contiennent encore certaines choses aux noms qui laissent rêveurs; poudre de cloportes, yeux d’écrevisses, poudre de noix vomiques, élixir de propriété…
Nous débouchons ensuite à la Salle Saint-Louis. Créée en 1661 à l’instigation de Louis Bétault, elle fut construite à la place d’une grange qui fermait la cour de l’Hôtel-Dieu et servait aussi de cuverie. Cette pièce contient d’incroyables coffres gothiques et renaissance ainsi que des coffrets, des statues et des vitraux des XVe et XVIe siècles. Le travail minutieux fourni par les artisans de l’époque est spectaculaire. On y découvre aussi des tapisseries ainsi que la fontaine et les lits du XIXe siècle, qui restent les principaux témoignages de cette salle consacrée autrefois aux malades. Cette partie témoigne des progrès de la médecine du XIXe au milieu du XXe siècle avec le développement de l’asepsie, de l’anesthésie, de la radiologie entre autres… Fascinant!
Ensuite, pour clore la visite, le sujet du Patrimoine viticole est lancé. Le vin a toujours joué un grand rôle à la fois comme médication et comme moyen de financement de l’hôpital. La vente des vins des Hospices de Beaune se déroule chaque 3e dimanche de novembre. Au cours de celle-ci est vendue aux enchères la production annuelle du domaine des Hospices de Beaune. Les bénéfices de la vente et du musée contribuent aux acquisitions de matériel hospitalier et à la modernisation des bâtiments, continuant ainsi l’œuvre de charité de Nicolas Rolin et Guigone de Salins à travers les siècles.

La visite dure une bonne heure, et coûte 10€ par adulte. J’ai trouvé ce monument vraiment superbe. Je n’imaginais cependant pas qu’il se trouvait en pleine ville, et j’avais en tête que la cour intérieure était visible de loin. Pas du tout. C’est même difficile de s’imaginer cela derrière la façade. C’est un lieu super intéressant pour voir ce à quoi pouvait ressembler les soins de l’époque, et se dire que le progrès est quand même énorme. L’architecture est tout simplement incroyable. Un vrai petit bijou qui vaut le détour.
A très vite.